Le jour où le pinson réveilla la forêt

À l’ombre d’un sous-bois, près d’une rivière, Raphaël, le joyeux pinson, s’ennuyait.

Le soleil perçait à travers les arbres les plus hauts.
L’eau, d’un gris argenté, restait immobile, sans la moindre danse.
Le vent dormait. Les arbres, figés, retenaient leur souffle.
Pas une seule de leurs belles feuilles ne bougeait.

Même les plantes et les fleurs, étalées sur le sol, exhibaient leur beauté dans une léthargie presque moqueuse.

Seules quelques fourmis traînaient des brindilles, écrasées sous une chaleur à peine atténuée par la fraîcheur du sous-bois.
Et pas un seul autre oiseau en vue pour jouer avec lui...

Soudain, un son étrange résonna près de la rivière.
Une punaise aquatique, concentrée, frottait deux parties de son corps.
Un stridulation si intense que Raphaël sursauta !

Puis il eut une idée.

— Et si je chantais ?

Raphaël lança quelques notes aiguës par intervalles,
accéléra en chantant plus grave,
et termina sur un dernier cri cristallin.

Intriguée, la punaise lui répondit, plus fort encore.

Le vent, curieux, fut réveillé par ce concert naissant.
Il souffla une douce bise.
Les feuilles bruissèrent.
La rivière clapota.
Et bientôt, d’autres oiseaux arrivèrent, poussés par cette étrange mélodie.

Un peu plus loin, des mouches et des bourdons, attirés par cette symphonie improvisée,
vinrent y ajouter leurs plus beaux bourdonnements.

Les arbres eux-mêmes, jaloux de tant d’harmonie,
renchérirent avec de doux craquements de branches.

Une sauterelle frotta ses ailes, pour accompagner la joyeuse troupe.
Et même les fourmis, galvanisées, redoublèrent d’efforts :
leurs grattements sur la terre devenaient percussions.

Ainsi naquit une chaleureuse, mélodieuse cacophonie.
Et bientôt, les forêts voisines l’imitèrent.
Puis les bois du monde entier.

Depuis ce jour, chaque promeneur attentif peut entendre, au détour d’un sentier,
ces sons qui apaisent l’âme et réchauffent le cœur.

Se doute-t-il, un seul instant…
… que cette offrande de la nature est née d’un jour d’ennui d’un petit pinson ?

Une mélodie née d’un silence… offerte à celles et ceux qui prennent le temps d’écouter.


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